
Perte de revenus locatifs et expropriation d’un logement insalubre
Expropriation et réparation intégrale du préjudice :
Pas d’indemnité d’expropriation pour perte de revenus locatifs en cas de logement insalubre
L’article 17 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen (« DDHC ») de 1789 constitue le fondement de l’expropriation pour cause d’utilité publique. Ce texte prévoit que « La propriété est un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité ». L’article L. 321-1 du code de l’expropriation précise que « Les indemnités allouées couvrent l’intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l’expropriation ». Il en ressort que le propriétaire bailleur exproprié doit, en principe, être indemnisé pour la perte de revenus locatifs.
Le juge judiciaire qui est seul compétent pour le contentieux de l’indemnité d’expropriation, s’est prononcé récemment sur la question de la réparation du préjudice du bailleur résultant de la perte de revenus locatifs en cas de logement insalubre.
Pour mémoire, les caractéristiques du logement décent sont fixées par le décret n°2002-120 du 30 janvier 2002 précisé, le cas échéant, par les règlements sanitaires adoptés par les préfets de département. Parmi ces caractéristiques, l’article 4 du décret du 30 janvier 2002 prévoit que « le logement dispose au moins d’une pièce principale ayant soit une surface habitable au moins égale à 9 mètres carrés et une hauteur sous plafond au moins égale à 2,20 mètres, soit un volume habitable au moins égal à 20 mètres cubes ».
Or, dans les faits ayant amené le juge civil à se prononcer, il a été relevé que si le bailleur exproprié louait son bien et percevait, à ce titre, des loyers versés par le preneur, il n’en demeurait pas moins que le bien en question disposait d’un volume habitable inférieur à 20 mètres cubes. La Cour d’appel de Paris avait donné raison au bailleur et validé le principe de l’indemnisation pour perte de revenus locatifs s’agissant d’un logement insalubre. Saisie d’un pourvoi en cassation contre cet arrêt d’appel, la 3ème chambre civile a jugé en sens inverse et cassé cet arrêt au motif que :
« En statuant ainsi, après avoir constaté que les deux logements loués ne répondaient pas, au regard de leur superficie, aux critères du logement décent que le bailleur est tenu de délivrer à son preneur, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il s’évince que l’expropriée ne pouvait se prévaloir d’un droit juridiquement protégé dont la perte ouvrirait droit à indemnisation, a violé les textes susvisés ».
Il en résulte que le bailleur ne perçoit pas d’indemnité d’expropriation pour perte de revenus locatifs en cas de logement insalubre. Cette décision s’ajoute aux nombreuses sanctions pesant déjà sur les bailleurs de logements insalubres et invite les férus d’immobilier à se montrer encore plus vigilants lorsqu’ils prospectent pour l’acquisition d’un bien qui pourrait se révéler insalubre.